La nouvelle vie de Bougazelli à la chambre 42 de la prison de Rebeuss

jeudi 9 janvier 2020 • 1290 lectures • 1 commentaires

Société 4 ans Taille

La nouvelle vie de Bougazelli à la chambre 42 de la prison de Rebeuss

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IGFM - Mis aux arrêts depuis en 15 novembre dernier dans une affaire de présumé trafic de faux billets de banque, l’ancien député Seydina Fall dit Boughazelli est passé des lambris dorés du pouvoir aux murs humides de la maison d’arrêt de Rebeuss. Une disgrâce qui s’est répercutée sur sa famille et ses proches, obligés de revoir leur train de vie. En attendant, seul face à son sort et avec une santé chancelante, Boughazelli essaie de se refaire en prison.   

Depuis son incarcération pour trafic présumé de faux billets de banque, le quotidien de Seydina Fall alias Boughazelli s’égrène à l’ombre, loin du halo qui illuminait son écharpe d’élu. Naguère courue, épiée, enviée, sa vie d’aujourd’hui ainsi que celle de ses proches chutent vertigineusement vers les abysses de la disgrâce. A la maison d’arrêt de Rebeuss où il croupit en détention provisoire depuis le 22 novembre 2019 pour «association de malfaiteurs, contrefaçon de signes monétaires, blanchiment de capitaux et corruption», l’ex-député «apériste», privé de salaire depuis l’éclatement de l’affaire et sa démission de l’Assemblée nationale, «tire le diable par la queue», selon ses proches.

Présenté comme un «soutien d’une famille nombreuse», dont sa génitrice, alitée et affaiblie par l’épreuve, Boughazelli, polygame marié à deux épouses, serait au bord du gouffre financier, malgré la sollicitude de ses amis et proches, l’élan de générosité de ses camarades de parti. «Ses collègues députés que sont Moustapha Cissé Lô, Djibril War et Abdou Mbow, lui ont rendu visite pour l’encourager et l’aider financièrement, renseigne un de ses proches. Toutefois, ces aides financières sont minimes, car Seydina Fall doit non seulement s’acquitter des dépenses quotidiennes de trois familles distinctes, mais il lui faut également rendre accueillant l’appartement où sa femme a nouvellement aménagé.»

Dans son entourage, certains au verbe amer vont jusqu’à pointer un manque de reconnaissance de ventre : «S’il y avait un retour d’ascenseur de la part de ceux que Boughazelli a eus à aider quand il était aux affaires, les conséquences de l’épreuve qu’il endure seraient moins dures. Les responsables qui l’ont assisté dans cette épreuve peuvent se compter sur le bout des doigts.» Comme le nombre de visites qu’il reçoit en détention. Esseulé au fond de sa cellule, Bougazelli aurait vu beaucoup de responsables nationaux et locaux du parti présidentiel lui tourner le dos.

A l’exception de quelques militants de base dont les visites rythment aujourd’hui ses mornes journées à Rebeuss. «Si Boughazelli tient encore le coup, c’est grâce aux visites que les militants ne cessent de lui rendre, soutient-on dans son entourage. Il peut parfois rester plusieurs jours à recevoir des citoyens qui ne sont pas politiquement colorés. Certains d’entre eux sont même de l’opposition. Le fait que des Sénégalais lambda se préoccupent de son sort lui fait oublier l’indifférence de ceux qui, à ses yeux, devaient être les premiers à s’enquérir de son état.»

«Son diabète s’est aggravé en prison»

Cette sollicitude inattendue lui aurait donné, selon ses proches, la force de faire face aux affres de la maladie. Ce diabète qui le ronge depuis des années et qui lui avait valu une hospitalisation controversée suite à l’éclatement de l’affaire. Libéré sur convocation après sa première audition par les gendarmes de la section de recherches de Colobane, le député n’avait pas déféré à temps à la deuxième convocation, au point de susciter moult interrogations et interprétations.

Interrogé le lendemain par L’Observateur, le député avait fait état d’«une hyperglycémie qui l’avait contraint à garder le lit dans une clinique de la place». A Rebeuss, le diabète dont il souffre depuis des années, se serait aggravé. Un de ses proches prétend qu’«il est fréquemment à l’infirmerie pour des soins. Il est aussi astreint à un régime alimentaire assez particulier lié à la pathologie». Rongé par le mal (et les remords ?), Boughazelli a beaucoup maigri, au point de faire naître des inquiétudes chez ses proches, bien que le concerné essaie toujours de dédramatiser et de prouver le contraire par son comportement. Mais face à l’épreuve, Boughazelli aurait, dit-on, trouvé refuge dans la spiritualité et le sport.

Ses proches peignent le tableau d’un homme à qui la loi a remis sur le chemin de la foi. Auto-proclamé inconditionnel de feu Serigne Saliou Mbacké, Boughazelli, en plus des cinq prières de la journée, s’adonnerait quasi quotidiennement à la lecture des Xassaïdes. Tout en offrant son épaule de grand-frère à quelques-uns de ses compagnons d’infortune. «Il prodigue également des conseils aux jeunes détenus de Reubeuss et ne cesse de formuler des prières pour qu’ils recouvrent la liberté», souffle un proche.

«Il souffre cruellement de ne pas voir son fils, Serigne Saliou»

Crédité d’une sociabilité tirée de son éducation reçue au Daara de Serigne Saliou Mbacké, il lui arrive souvent de distribuer les denrées apportées par ses visiteurs et qui s’amoncellent devant sa porte de sa cellule de la Chambre 42 de la prison de Rebeuss, celle dite des «prisonniers Vip». Il ne rechigne pas à enfiler le blouson pour quelques foulées autour du terrain de football de la prison. «C’est son deuxième passe-temps favori en dehors de la lecture du Saint Coran et des Xassaïdes», confie un proche. Ancien footballeur redouté par ses adversaires, Seydina Fall se consacre beaucoup au sport entre les quatre murs de la citadelle du silence. «Il n’a certes plus ses 20 ans, mais il n’a pas pour autant perdu ses qualités de footballeur. A Rebeuss, il dispose de beaucoup de temps pour faire du sport, dans le double but d’opposer une résistance à son diabète de type 2 et de s’affranchir du stress des rigueurs carcérales», enchaîne notre interlocuteur.

«Papa poule», sa plus grande douleur de prisonnier lui viendrait de la séparation avec son petit dernier, son fils Serigne Saliou. «Son portrait craché», révèle-t-on. Une ressemblance manifeste qui lui vaut aujourd’hui d’être affublé du surnom de «Boughazelli bou ndaw (petit Boughazelli). «Il souffre cruellement de ne pas voir son Serigne Saliou. A ce jour, il est le seul fils du député à ne pas lui avoir rendu visite depuis son incarcération», souffle-t-on. Une absence qu’un proche explique par le fait que Boughazelli «ne pourrit pas supporter de le voir à travers une grille et de ne pouvoir le tenir dans ses bras, l’embrasser et le pouponner comme il en a l’habitude depuis sa naissance». Un plaisir paternel pour lequel il paierait tous les billets du monde…

AMARY GUEYE

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Daouda Mine

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