«Dénouement» dans le rapatriement des corps des deux Sénégalais morts en Espagne

lundi 23 décembre 2019 • 472 lectures • 1 commentaires

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«Dénouement» dans le rapatriement des corps des deux Sénégalais morts en Espagne

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iGFM-(Dakar) Dans le village de Gourel Bocar (département de Tamba), on pleure encore un fils, Alassane Diallo 27 ans, décédé en Espagne et dont le corps tarde à être rapatrié, faute de moyens (9 000 euros). Marié et père de 3 enfants, il est mort asphyxié en compagnie de son cousin, Abdoulaye Diallo, le 23 octobre 2019. Dans la maison familiale qui continue de recevoir du monde, ses proches vivent toujours l’angoisse de ne pouvoir disposer de sa dépouille. Un bienfaiteur a décidé de supporter les frais de rapatriement des dépouilles. 

Minuscule hameau niché sur la route nationale n°6, dans la commune de Missirah (département de Tamba), le village de Gourel Bocar s’est tristement révélé le 23 octobre 2019, à la suite du décès tragique de l’un de ses fils, Alassane Diallo, 27 ans, établi en Espagne. Une triste nouvelle qui a consterné les habitants de ce hameau et ses environs. La raison, Alassane Diallo a succombé dans les mêmes circonstances et dans la même pièce qu’un autre fils de la contrée, Abdoulaye Diallo. À la douleur de la mort d’Alassane Diallo et de son cousin Abdoulaye, s’ajoute le fait que leurs proches peinent à recevoir les dépouilles toujours retenues en Espagne, faute de moyens. Une manne financière que les proches, amis s’évertuent depuis à réunir sans y parvenir.

Une situation désespérante qui corse l’angoisse à Gourel Bocar, un hameau de 400 âmes, majoritairement composée de peulhs. Ici, retrouver le domicile du défunt Alassane Diallo est un jeu d’enfant. À l’entrée de la maison des Diallo, Mamadou, jeune frère du défunt, regard pensif, se charge d’accueillir les visiteurs. Il nous conduit à l’intérieur de la maison. Une imposante concession faite de quelques pièces en ordre dispersé. Dans la cour principale, des femmes discutent à voix basse. Toutes voilées, certaines égrainant un chapelet. À quelques mètres de là, un groupe d’hommes s’était retiré dans une case. Un calme plat règne sur les lieux. Malgré un temps relativement clément, les occupants affichent des mines crispées qui s’assombrissent davantage à l’évocation du nom d’Alassane Diallo. Dans la foule, le maître des lieux, le vieux Sara Diallo 62 ans, père d’Alassane.

Cultivateur de son état, le sexagénaire qui égrenait un chapelet, marmottant visiblement des versets du Coran, accepte volontiers de se prêter aux questions de L’Observateur. «Mon fils Alassane Diallo est âgé de 27 ans. Il avait une épouse avec qui il a eu 3 enfants : Deux garçons, Abdoulaye 9 ans, Abdoul 5 ans et une fille, Fatoumata 2 ans. Je peux vous assurer qu’Alassane était l’espoir de la famille. Il n’a jamais fréquenté l’école française. A l’âge de 8 ans, je l’ai amené à Kanel pour qu’il apprenne le Coran. Après avoir bien maitrisé le Saint Coran, il est rentré au bercail. Je l’ai initié aux techniques de l’agriculture. Il a effectué cette activité plusieurs années durant. C’est par la suite qu’il a reçu une invitation de sa grande sœur, établie en Espagne avec son mari. Après s’est fait délivrer son passeport, Alassane a vendu ses récoltes et a pu voyager en Espagne via le Maroc. Il y a été accueilli par sa grande sœur et son beau frère. C’était dans le courant du mois d’août 2018», se souvient le vieux Sara Diallo. Visiblement envahi par des souvenirs de son défunt fils, le sexagénaire marque un temps d’arrêt. Il formule quelques prières, réprime des larmes, se ressaisit et poursuit. «Alassane était un garçon très ambitieux. En Espagne, il n’avait pas de papiers pour y vivre régulièrement. Malgré tout, il était parvenu à décrocher un travail dans une ferme agricole. Il nous envoyait assidument, l’essentiel de ses revenus, afin de nous assurer une vie plus décente. Il prenait régulièrement de nos nouvelles. Le mercredi 23 décembre 2019, lorsque le téléphone a affiché un numéro d’Espagne, nous pensions que c’était encore Alassane. Malheureusement, c’était son beau-frère Alpha, qui était au bout du fil. C’est lui qui nous a annoncé la tristesse. Ce jour, je suis resté sans boire ni manger et je ne m’en suis même pas rendu compte. Je suis musulman, j’accepte donc la volonté divine. Mais mon plus grand chagrin aujourd’hui est le fait que je ne puisse pas recevoir la dépouille de mon fils, faute d’argent. C’est pourquoi, je sollicite des autorités de l’aide pour rapatrier sa dépouille et celle de son cousin Abdoulaye. C’est une grosse perte pour le village. Tous ici ne souhaitent qu’une chose, le retour des dépouilles de Abdoulaye et d’Alassane pour que nous puissions les enterrer et prier pour le repos de leur âme.»

Mariama Goulo Diallo, épouse d’Alassane : «Le message vocal de mon mari la veille de son décès…»

Effondrée, Mariama Goulo Diallo, 21 ans, peine à dissimuler le chagrin qui la ronge. Le visage boursoufflé, elle est inconsolable. Sous son large foulard -elle s’en sert de temps en temps pour écraser des larmes qui perlent sur ses joues-, sa voix est à peine audible. Elle confie son vœu le plus cher : revoir pour une dernière fois, la dépouille de son mari. «Je demande solennellement aux autorités du pays et autres bonnes volontés de nous aider à ramener le corps sans vie de mon mari et celui de son cousin. «Mon mari n’est pas resté longtemps en Espagne. Il se tuait au travail pour que nous ne manquions de rien. Il avait une grande complicité avec tous les membres de sa famille et avait une attention particulière pour ses trois enfants. J’ai certes perdu un mari, mais le village a aussi perdu un grand espoir. Je m’en remet au bon Dieu et le remercie de m’avoir fait connaître un mari aussi bon, pieux et respectable.» Poursuivant, elle ouvre grandement les yeux, gesticule et interroge : «Quand verrai-je mon époux ?» «Le mardi 22 octobre dernier (la veille du décès d’Alassane), mon époux m’a envoyé un message vocal à 20h08mn. Cette nuit-là, il avait la voix cassée. J’ai écouté en boucle son message vocal dans lequel il a pris le temps de me saluer affectueusement. Puis, il a pris des nouvelles des enfants et des membres de la famille, tour à tour. Il m’a même demandé si nous avions entamé les récoltes. J’avais le pressentiment que quelque chose n’allait pas. Mais cette nuit, je n’ai pas fermé l’œil. Des images bizarres et interrogations hantaient mon sommeil. Le lendemain, on nous a annoncé la triste nouvelle», avoue l’épouse éplorée.

Mamadou Diallo, jeune frère du défunt : «Les grands projets qu’Alassane avait pour sa famille et sa communauté sont hypothéqués avec sa mort»

«Alassane Diallo est mon grand-frère. Il me disait souvent que son ambition n’était pas de rester éternellement en Espagne. Il voulait gagner beaucoup d’argent avec son travail et rentrer au village pour développer des projets d’envergure au bénéfice des jeunes. Alassane était très dégourdi et c’est qui fait qu’il n’a pas tardé à trouver un emploi dès son arrivée en Espagne. Il ne lui restait qu’à avoir des papiers légaux. Sa mort le mercredi 23 octobre dernier, va changer beaucoup de choses ici. Il tenait aussi à construire une belle maison bâtisse pour ses parents», confie Mamadou Diallo. Ce jeune frère du défunt reste tout de même très optimiste quant au rapatriement de la dépouille d’Alassane. Aux dernières nouvelles, nous souffle-t-on, une haute autorité de la région s’est engagée à prendre en charge les frais de rapatriement des dépouilles d’Alassane et de son cousin Abdoulaye Diallo.

 Pape Ousseynou DIALLO

 

 

 

 

 

 

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Daouda Mine

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