Parcours : Serigne Mbacké Ndiaye, trajectoire d’un opportuniste politique

samedi 21 décembre 2019 • 4455 lectures • 1 commentaires

Politique 4 ans Taille

Parcours : Serigne Mbacké Ndiaye, trajectoire d’un opportuniste politique

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IGFM - Homme politique très controversé, Serigne Mbacké Ndiaye serait habitué à tirer parti des circonstances, en transigeant avec ses principes. Quitte à ravaler son vomi, l’essentiel est de satisfaire ses intérêts. 

Cet aprèm-là, à la sortie de la ville, Khombole s’étripe avec ses fantômes, chasse les chimères d’une étourdissante oisiveté. Prise dans le cauchemar de l’impécuniosité, elle couche son mal-être à plat ventre à même le bord de l’asphalte, sur le filet de goudron qui traverse la ville comme une raie mal ajustée au milieu d’un tas de cheveux ébouriffés. Khombole a mal. Cette commune du département de Thiès, terre de refus, anciennement située entre les provinces du Baol et du Cayor, vit surtout le trauma des écarts politiques d’un de ses fils : Serigne Mbacké Ndiaye. L’ancien ministre porte-parole de la Présidence de la République, sous Wade, qui a rejoint le Président Sall, a fait dernièrement l’objet d’un terrible bashing sur les réseaux sociaux. Avec sa proposition de suppression de la limitation des mandats présidentiels, le membre du camp de la majorité au Pouvoir, engagée dans le Dialogue national, s’est mis à dos tout le peuple. Ou presque.

«C’est une girouette politique, esclave de ses intérêts personnels»

Le professeur Alioune Tine, ancien patron la Rencontre africaine pour la défense des droits de l’Homme (Raddho) et fondateur de Africajom Center, s’en est (ou)vertement pris à l’ancien ministre sur son compte Twitter, dans des termes très durs. «Les mêmes personnes qui ont poussé le Président Wade dans l’impasse et l’incertain, puis l’ont trahi pour servir leurs intérêts égoïstes, ne méritent guère attention. Le travestissement du système politique et démocratique les fait vivre comme des virus du Sida», charge-t-il. Au royaume d’enfance du coordonnateur du Rassemblement pour la pérennisation du libéralisme (Rapel), les mots utilisés pour dénoncer les esclandres politiques de Serigne Mbacké Ndiaye font mal, mais Khombole ne s’en émeut guère.

Babacar Bâ, ancien maire de Khombole, a cheminé avec l’ancien ministre de Wade au Parti démocratique sénégalais (Pds), qu’il a intégré en 1975. «Serigne Mbacké Ndiaye est comme il est. Cela veut tout dire. Il a sa façon de faire la politique, que je ne partage pas. Pour moi, la politique, c’est d’abord une question d’éthique. C’est l’intérêt national et celui de l’Afrique. Si je m’engage en politique, c’est pour l’intérêt du Sénégal. Je ne m’engage pas en politique pour gérer mes propres intérêts. Serigne Mbacké Ndiaye n’est pas mon ami, c’est mon frère. D’ailleurs, sa grande sœur est l’une de mes responsables. Vous comprendrez que je ne puisse pas dire certaines choses sur lui. Je ne veux pas le juger mais je ne ferai jamais comme lui», souligne-t-il. Pape Moussé Diop, responsable du Pds à Thiès, a connu Serigne Mbacké Ndiaye à la même époque.  «C’était en 1978. Il a très tôt milité au Pds à Khombole. Il a été même élu secrétaire général du conseil national de l’Union des jeunesses travaillistes (Ujt). Il est resté avec nous pendant 3 à 4 ans», se souvient-il. A l’en croire, Serigne Mbacké Ndiaye a même fait la prison avec d’autres jeunes de l’Ujt. «Ils avaient invité Puritain Fall au quartier Cité Lamy pour animer une conférence publique. En réalité, les jeunes libéraux, qui n’appréciaient pas les sorties au vitriol de Puritain Fall contre Me Abdoulaye Wade, vont le séquestrer et le brutaliser pendant plusieurs heures. Serigne Mbacké Ndiaye et ses frères libéraux vont se retrouver à la maison d’arrêt et de correction de Thiès», révèle Pape Moussé Diop.

«Je le rencontrais souvent chez Tanor, alors qu’il était avec le Président Wade»

La première transhumance de Serigne l’a mené au Pds/R. Le professeur Serigne Diop, après avoir vainement contesté le leadership de Me Abdoulaye Wade, farouche opposant au Pouvoir socialiste de l’époque, met sur pied, le 2 juillet 1987, le Parti démocratique sénégalais/Rénovation (Pds/R). Et Serigne Mbacké voit dans cette scission une aubaine. Il court au secours des possibles prébendes, aux bénéfices que pourrait engendrer son militantisme de la première heure. L’universitaire et ancien ministre, Serigne Diop, va l’accueillir dans son nouveau parti sans arrière-pensée, sûr des convictions du jeune homme. Mais mal va lui en prendre. Serigne Mbacké Ndiaye, qui est habitué à tirer parti des circonstances en transigeant avec ses principes, quitte à ravaler son vomi, va rejoindre le Parti Socialiste.

Moins d’un an après son arrivée au Pds/R, Serigne Mbacké achète la carte du Parti socialiste (Ps), en 1988. Le jeune socialiste sera élu conseil municipal et adjoint du maire socialiste de Khombole, Momar Seyni Ndiaye. Son nouveau mentor va le mettre en rapport avec le  maire de Dakar d’alors, Mamadou Diop, qui lui offre un emploi municipal. Pape Amadou Sall, secrétaire administratif de l’union régionale du parti socialiste (Ps) et membre du bureau politique, a encore en mémoire ce passage tumultueux de Serigne Mbacké Ndiaye au Ps. «J’ai fait le Ps avec Serigne Mbacké Ndiaye. Je ne le qualifierais pas d’homme politique. C’est un homme qui n’est intéressé que par le pouvoir. Quel que soit le régime qui est en place, il va se mouvoir pour se transformer en caméléon pour épouser les mêmes contours et les mêmes couleurs. Il n’avait pas de grandes responsabilités au parti socialiste. Mais effectivement, il a eu a en bénéficier d’un emploi», confie-t-il. Et Pape Amadou Sall d’enfoncer le clou : «Serigne Mbacké Ndiaye n’est préoccupé que par ses intérêts personnels. Tout est opportuniste chez lui. Même quand il est du camp du pouvoir, il jette ses tentacules partout. Il crée des ponts pour qu’en cas de problème, il puisse se trouver un point de chute. Du vivant de Ousmane Tanor Dieng, il était avec Abdoulaye Wade au Pouvoir, mais je le croisais souvent chez Tanor. D’ailleurs, je le rencontrais dans plusieurs maisons de responsables politiques du parti socialiste, alors qu’il était avec le Président Wade. C’est sa nature. C’est un opportuniste.» Une «tortuosité» politique qui lui a permis de retrouver, dans les années 2000, le Pape du Sopi, qu’il avait vomi à la fin des années 80.

«Il veut plonger le pays dans le chaos»

Quand le pouvoir socialiste est défait en 2000, il intègre le Parti de la réforme (Pr) d’Abdourahime Agne, en 2001. A la faveur de la seconde alternance, il se retrouve au pouvoir. D’abord comme Président du conseil d’administration (Pca) de la Caisse nationale du crédit agricole (Cnca). Ensuite comme ministre conseiller, porte-parole du président de la République Abdoulaye Wade. Et enfin, Directeur de cabinet politique du président de la République. «Il avait même cherché à revenir militer à Thiès. C’était l’époque où une armada d’hommes politiques faisaient croire à Me Wade qu’ils pouvaient défaire Idrissa Seck», informe Pape Moussé Diop, soulignant ne pas lui connaitre une activité professionnelle. «Sa profession, c’est la politique. Je le connais depuis 1978. Il fait partie de cette race d’hommes qui ne vivent que de la politique. Il trouve à travers la politique des raccourcis qui lui permettent d’atteindre des stations. A 99%, ce sont des médiocres», juge-t-il.

Très zélé, à chaque fois qu’il rejoint une mouvance présidentielle, Serigne Mbacké Ndiaye s’en va toujours comme un courtisan quand le pouvoir arrive à terme. Défenseur acharné du Président Wade, Serigne Mbacké Ndiaye a vite fait de créer la Convergence libérale et patriotique (Clp) pour s’émanciper du Pape du Sopi qui vient de chuter terriblement du Pouvoir. Un raccourci qui l’a éloigné du Président déchu et rapproché du Président élu. «Ce n’est même pas de l’opportunisme, c’est sa nature. Ils sont nombreux aujourd’hui. Des Serigne Mbacké Ndiaye dans le monde politique, on en trouve à l’Assemblée nationale, au conseil économique et même dans l’attelage gouvernemental. Dans la conscience collective,  l’image de Serigne Mbacké Ndiaye ne passe pas. Je ne pense pas qu’il puisse apporter un bonus au Président Macky Sall. Il est fiché par les Sénégalais. Et cette race de politiciens est honnie par les populations. C’est eux qui créent les crises. Ils constituent des obstacles à l’évolution démocratique du pays. Parce qu’ils n’ont pas une réflexion saine», confie Pape Moussé Diop.

Mouhamadou Lamine Massaly, ancien camarade de Serigne Mbacké Ndiaye, a les mêmes convictions sur l’attitude politique du coordonnateur de « Rappel ».  «Entre les deux tours de la Présidentielle de 2012, c’est lui qui a annoncé en premier la victoire de Me Wade. Si Me Wade avait écouté Serigne Mbacké Ndiaye, le Sénégal serait plongé dans une instabilité sans précédent. Il passe son temps à manœuvrer et utilise avec Macky Sall les mêmes stratégies qu’il déroulait sous Wade. Il veut plonger le pays dans le chaos. Le Président Macky Sall doit faire très attention avec Serigne Mbacké Ndiaye, qui est capable de faire basculer le pays dans le chaos», alerte-t-il.  A bon entendeur.

OUSSEYNOU MASSERIGNE GUEYE

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Daouda Mine

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