«Pourquoi je préfère Locotte à El Diablo»

jeudi 4 juin 2020 • 821 lectures • 1 commentaires

Sport 3 ans Taille

 «Pourquoi je préfère Locotte à El Diablo»

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IGFM - Des noms ayant marqué le football sénégalais, Boubacar Sarr Locotte est l’un des plus en vue. Du joueur suintant classe et aura qui en font une sorte d’intellectuel organique du sport sénégalais. Surnommé "El Diablo", il préfère plutôt "Locotte" comme sobriquet.

Que signifie le sobriquet «El diablo» dont on vous affuble ?

El diablo était le surnom d’un grand frère Ndiassé (Tall, Ndlr) à Dial Diop. C’est de lui que m’est venu ce surnom que j’ai adopté. Je ne sais pas si cela vient du film ou pas mais quand je suis arrivé là-bas en tant que jeune, ils m’ont donné le nom.

Parce que vous aviez cette faculté à renverser les matches...

Peut-être. Je crois que cela venait de ça parce que le grand Ndiassé était aussi très fort. C’était un attaquant très doué. A Dial Diop, quand il y avait un problème, on faisait la différence. C’est pour cela qu’ils m’ont surnommé comme ça. J’étais un junior à cette époque et je faisais de grands matchs avec l’équipe première. C’est ainsi que m’est venu le surnom parce que j’étais un petit diable sur le terrain.

Et 50 ans après, cela vous fait sourire ?

Cela me fait sourire. Quand on est en plein dedans, on ne s’en rend pas compte. Et finalement, avec l’âge, on se dit, c’est incroyable, on a eu beaucoup de surnoms. A l’époque dans les quartiers, il y avait des associations de jeunes et souvent, on avait tous des surnoms.

Lequel de ces surnoms, El Diablo et Locotte, vous a le plus marqué ?

C’est celui de Locotte qui m’a le plus marqué.  J’étais de la Médina, on avait beaucoup de vieilles rues. Il y a pas mal de joueurs qui étaient de Dakar, du Jaaraf, des gens qui ont appris le football dans ces quartiers de la Médina. Le matin, à partir de 10 heures, c’était des matches 8 contre 8 ou 7 contre 7 ou 10 contre 10. L’après-midi, c’était pareil. On faisait des une-deux, parfois on essayait d’éviter des arbres etc. Moi, je jouais un peu partout : attaquant, défenseur, milieu de terrain, gardien. Il y avait un grand-frère, Bara, qui habitait dans le quartier, mais qui était émigré en Espagne, il m’a vu jouer et m’a surnommé «El loco (le fou)». Mes copains de la Médina l’ont transformé en Locotte. Et cela sonnait bien.

Très jeune, vous avez fait montre d’une adresse devant les buts, c’était inné ou le fruit de votre travail ?

A l’époque, il n’y avait pas encore de centres de formation. Les «Navétanes» duraient trois mois. Et c’est durant ces «Navétanes», lors de mes vacances scolaires que j’ai appris le métier (au Football club de Ndioba). J’arrivais toujours à marquer un but dans les petites ou grandes rues, dans les espaces serrés. Puis, cela me faisait plaisir de marquer des buts parce que j’avais la joie de tous mes co-équipiers. On était tous des copains et quand je marquais, tout le monde sautait sur moi. Cela m’a marqué. J’ai pris goût à cela. Je suis devenu buteur dans les «Navétanes», puis je suis parti chez les juniors à Dial Diop. C’est là où j’ai vraiment gardé cette sensation de buteur. Au fil des années, je progressais. J’étais à un minimum de 16 buts par an. En France, c’était pareil. Je tournais autour de 18 et 20 buts par saison.

En France, vous avez évolué dans les plus grands clubs : Marseille, Cannes, Psg, Toulon etc.

J’ai débuté au Sporting club de Toulon en 1973 en Ligue 2. J’ai fini la première année comme deuxième meilleur buteur, la deuxième année, meilleur buteur avec 25 buts. L’Olympique de Marseille (OM) m’a acheté par la suite. J’ai fait ma carrière entre l’OM et le PSG. Durant mon contrat à l’OM (1975-1979), j’ai été prêté un an à Cannes (1976-1977). Après, je suis revenu et j’ai terminé mon contrat à l’OM et le Psg m’a acheté (1979-1983). Je suis resté 4 ans. Marseille m’a fait revenir encore parce qu’il était descendu en Ligue 2. Je suis revenu (1983-1985), j’ai participé à sa remontée en première division (en 1983). Ensuite, c’était presque la fin de ma carrière et je suis parti à Martigues (1985-1987). J’y ai passé 3 ans avant de faire mon jubilé où j’ai fait 100 000 spectateurs (40 000 le samedi et 60 000 le dimanche) au Sénégal, au Stade Léopold Sedar Senghor (en décembre 1986). C’est l’occasion pour moi de saluer Mariot Bonadei qui m’avait amené en Europe.

L’année de la remontée à Marseille, vous avez fait sensation…

J’ai vraiment cartonné. J’ai fait une très belle saison avec l’OM où on avait de très bons attaquants, (Marc) Pascal, (Zarko) Olarevic qui était Serbe. L’OM jouait les premiers rôles pour remonter. J’ai fini meilleur buteur avec 21 buts. C’est pour cela que les Marseillais m’apprécient beaucoup. J’ai fait ce club deux fois. Je n’ai jamais été sifflé et ils m’ont toujours apprécié. De même qu’au PSG où j’ai gardé de bons rapports. Les Parisiens ne m’ont jamais critiqué ou sifflé. Ce sont mes deux clubs de cœur et à chaque fois qu’il y a «Classico», les journalistes m’appellent et je leur dis que c’est un match où je suis neutre. Et pourtant, j’ai plus duré au PSG où j’ai fait 5 ans comme joueur et 10 ans comme entraîneur adjoint.

 Et votre histoire avec l’équipe nationale du Sénégal…

C’est une histoire très longue. Je fais partie des joueurs qui ont le plus duré en équipe nationale. J’y ai fait 15 ans, même si je n’ai pas fait tous les matchs. J’ai eu de la chance, car (le défunt) Mawade Wade m’avait sélectionné quand j’étais junior, donc j’ai fréquenté 3 générations. Ce qui est rare. C’étaient de bons moments. Ce qui nous manquait, c’était de participer à la CAN. On était resté près de 18 ans sans participer à la CAN (Asmara 1968 jusqu’à Caire 1986). Tous ces grands joueurs n’ont pas eu la chance de jouer la CAN. J’ai eu la chance en fin de carrière, avec la génération d’Oumar Guèye Sène et (Jules) Bocandé de jouer la Can en 86 au Caire. C’était ma première et dernière CAN. J’ai fait une CAN en tant que joueur et 4 en tant qu’entraîneur.

Footballeur, qui était votre idole ?

Michel Platini. J’ai joué plusieurs fois contre lui. C’était un joueur exceptionnel qui m’avait beaucoup marqué. Au Sénégal, j’ai beaucoup aimé Mbaye Fall du Jaaraf. C’était un joueur complet, capable de faire la différence dans les matches. Malheureusement, il n’a pas eu la chance de faire une grande carrière professionnelle et de disputer une Coupe d’Afrique des nations, mais il faisait partie des très grands joueurs du Sénégal.

Saliou GACKOU

 

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Daouda Mine

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