Retraite politique : Bathily, Landing, Madior, le crépuscule des «idoles»

mercredi 2 décembre 2020 • 841 lectures • 1 commentaires

Politique 3 ans Taille

Retraite politique : Bathily, Landing, Madior, le crépuscule des «idoles»

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Ils s’appellent Abdoulaye Bathily, Madior Diouf, Landing Savané… icônes de la «Gauche» sénégalaise et symboles des grandes années de lutte pour l’instauration de la Démocratie au Sénégal, ils sont aujourd’hui tous en retrait, total ou partiel, de l’espace politique.

Ils étaient admirés, adulés, respectés. Porteurs des idéologies marxistes, socialistes, voire  syndicalistes, ils ont marqué l’histoire politique du Sénégal, enseigné le combat à toute une génération de Sénégalais. Leaders de gauche et opposants farouches du Président Abdou Diouf, ils sont - avec Me Abdoulaye Wade et quelques rares autres -, les symboles des grandes luttes des années 80-90 qui ont abouti à l’instauration de la Démocratie dans le pays. Mais depuis la présidentielle de 2012 qui a consacré l’élection de Macky Sall à la magistrature suprême, ces «dinosaures» de la politique sénégalaise semblent lever le pied. Le temps faisant son œuvre, la gaîté ordinaire des années de braise a cédé à une sorte de douce mélancolie des moments de retrait de la vie politique. Un décrochage presque effectif pour certains, total pour d’autres.

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«Il faut savoir s’arrêter»

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Secrétaire général de And-Jef/Parti africain pour la démocratie et le socialisme (Aj/Pads), Landing Savané n’a plus occupé de fonctions publiques depuis presque une décennie. Et ses sorties médiatiques sont aussi rares que ses prises de paroles politiques.  Au bout du fil, l’ancien ministre de l’Artisanat, des mines et de l’industrie sous le régime de Me Abdoulaye Wade explique son retrait. «On ne peut pas vivre plusieurs vies. On a une période où on est jeune, plein d’ardeur et de dynamisme, où on est en première ligne. Ce qui est normal. Mais à partir d’un certain moment, on ne peut pas vivre sa vie et celle des générations suivantes. Il faut laisser à chaque génération la possibilité de vivre sa vie, de s’exprimer. J’ai estimé que j’avais fait pour l’essentiel, ce que je pouvais pour faire avancer les causes auxquelles j’ai toujours cru et auxquelles je crois encore, mais que maintenant, il revient aux générations plus jeunes de prendre les luttes en charge avec leurs préoccupations et leurs méthodes pour rajeunir les choses.» Sauf que Landing Savané garde toujours ses fonctions politiques, mais à titre presque honorifique. «Je continue à parler à mes camarades de parti, à conseiller, dire ce que je pense des choses, mais seulement en interne. Mais, pour la communication extérieure, je laisse les plus jeunes s’en occuper», explique le natif de Bignona, aujourd’hui âgé de 75 ans.


«Il est plus décent de ne pas se bousculer avec les jeunes»


Secrétaire général du Rassemblement national démocratique (Rnd), le professeur Madior Diouf, non plus, n’intervient plus dans le débat politique. A la tête du Rnd depuis 1992, l’ancien ministre de la Culture dans le gouvernement de Moustapha Niasse, après l’alternance de 2000, n’a pas encore décroché. Mais, l’ancien compagnon de Cheikh Anta Diop est conscient qu’à 81 ans, l’heure a sonné pour quitter ses fonctions à la tête dudit parti. «Je n’ai plus 20 ans. Je suis à la retraite comme enseignant à l’Université depuis 2005. En politique, je suis encore actif, mais je prépare les jeunes à prendre la relève. Là, je crois que c’est une question de date. C’est le Covid-19 qui a retardé les choses. Maintenant, il va nous falloir tomber d’accord sur une date. Depuis 1992, je suis à la tête du Rnd, il est temps effectivement que les jeunes prennent la relève. Il est plus décent de ne pas se bousculer avec les jeunes dans les médias», explique-t-il.


Le silence du professeur Madior Diouf s'expliquerait aussi par le fait que l’homme pense avoir bien fait son temps. «La nouvelle génération ne nous fait pas de l’ombre parce que nous pouvons avoir la possibilité d’intervenir, mais on le fait de manière beaucoup plus analysée, discutée. Ce n’est pas, en réalité, le discours pour faire du bruit, pour apparaître qui nous motive. Fort heureusement pour notre pays, ce n’est pas toujours nécessaire d’intervenir, d’avoir un discours pas polémique mais faire un discours de contribution à la vie nationale. La vie politique telle qu’elle se déroule actuellement au Sénégal ne me pousse pas à intervenir souvent, cela signifie une vie politique apaisée, sage et c’est une bonne chose pour le pays. Il n’y a pas de raison particulière à ce qui peut être conçu comme un silence», explique le vieux briscard politique, retrouvé dans sa villa de Sacré-Cœur.


«On ne peut pas faire son temps et celui des autres»


Ancien chef de file de la Ligue démocratique/Mouvement pour le parti du travail (Ld/Mpt) et chantre du «Jallarbi», le professeur Abdoulaye Bathily, qui s’est spécialisé, par la suite, dans la gestion des conflits en Afrique, s’est, lui, totalement retiré de l’espace politique. Contacté par L’Observateur, l’ancien professeur d'histoire moderne et contemporaine à l'Université Cheikh Anta Diop de Dakar, qui a 73 ans actuellement, résume sa posture actuelle en une phrase. «Je ne fais plus de politique, je suis à la retraite. Depuis très longtemps, j’ai quitté mes fonctions politiques. On ne peut pas faire son temps et celui des autres», affirme-t-il. C’est au 7ème Congrès de la Ligue démocratique (Ld), tenu en juillet 2013, que le Professeur Abdoulaye Bathily a fait ses «adieux» à la politique. Après 29 ans à la tête du parti, l’ancien ministre de l’Environnement dans le gouvernement de Habib Thiam a demandé à ses camarades de lui permettre de se retirer de la direction de la Ligue démocratique (Ld). Sa décision actée par le Congrès, le professeur Bathily a été alors remplacé par Mamadou Ndoye. Qui, lui aussi, a, semble-t-il, pris sa retraite politique.


SOPHIE BARRO

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Publié par

Namory BARRY

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