Le 3-5-2 d’Aliou Cissé décortiqué par des spécialistes

lundi 2 avril 2018 • 1006 lectures • 1 commentaires

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Le 3-5-2 d’Aliou Cissé décortiqué par des spécialistes

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iGFM-Théoricien du football reconnu par ses pairs, l’ancien sélectionneur de l’équipe nationale d’Algérie, ex entraîneur de Lorient et du Stade Rennais, Christian Gourcuff, joint au téléphone, décortique le système de jeu (3-5-2) expérimenté par Aliou Cissé au dernier stage des Lions. Nous avons aussi sollicité les éclairages de Guy Roux, meilleur entraîneur européen en 1996, Michel Dussuyer, ancien sélectionneur de la Côte d’Ivoire et de la Guinée, ainsi que Lamine Dieng du Sénégal.

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Christian Gourcuff, ancien sélectionneur d’Algérie et ex-coach de Lorient

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«Il faut trouver des joueurs avec un profil adapté»


LE 3-5-2 -«C’est un système qui est assez peu pratiqué. C’est un système relativement difficile. Ça demande du temps et ne s’improvise pas. C’est difficile en deux jours, de dire : on va jouer en 3-5-2 et puis deux jours après, revenir à 4 derrière. Ce n’est pas ma conception de la mise en œuvre du jeu collectif. Il faut travailler les automatismes, que les principes soient clairs. Cela nécessite de l’investissement à l’entraînement. Pour que ce système (3-5-2) soit efficace, il faut que cela soit bien huilé, avoir une grosse maîtrise et une grosse agressivité dans la récupération du ballon. Sinon, ça devient vite un 5-3-2, ce qui n’est pas très favorable au jeu. Je ne suis pas favorable au système 3-5-2, parce que c’est trop flou et demande, sur le plan physique, beaucoup d’efforts. D’une façon générale, quand le système n’est pas bien huilé tactiquement, on se retrouve avec 5 derrière et ça devient très défensif. Ça pose des problèmes au milieu du terrain. On a tendance à subir le jeu et à procéder par des contres.»


CARACTERISTES - «Autant dans le 4-4-2 il y a une participation offensive des défenseurs, à tour de rôle, surtout les latéraux, dans le 3-5-2, les latéraux doivent jouer le rôle de piston. Ils sont en permanence dans le couloir. Ça reste un peu stéréotypé. Pour les trois centraux, il n’y a pas de choix, ils restent dans une position défensive. C’est plus rigide. C’est surtout le rôle des excentrés, les deux latéraux, qui diffère. Il faut beaucoup d’intelligence pour à la fois avoir le surnombre offensif nécessaire et revenir en couverture. Ils doivent être intelligents dans leurs placements et physiquement être capables de faire les courses dans le couloir pour s’intégrer devant et revenir. Lamine Gassama a ces capacités pour jouer ce rôle-là, il est capable de faire les courses et de s’intégrer offensivement. Peut-être, que tactiquement, ça va être un peu plus difficile pour lui de trouver le bon alignement, le bon ajustement. Ce ne sont pas les caractéristiques du football sénégalais, surtout les joueurs qui composent la sélection. Il faut trouver des joueurs avec un profil adapté.»


ANIMATION- «Comme pour tous les systèmes, il faut du temps. A l’entraînement, il faut que les choses soient bien claires. Il faut aussi avoir des joueurs qui ont ces caractéristiques. Surtout avoir du temps de le travailler, sauf si l’on a des joueurs qui sont habitués à ce système en club. Le problème des sélections, c’est surtout le manque de temps dans la préparation tactique. Avant une compétition comme la Coupe du Monde, on a un peu de temps pour la préparation et peaufiner les automatismes. Dans les rassemblements au cours de l’année, on n’a qu’une semaine quand on a deux matches. On n’a pas le temps de travailler tactiquement.»



Guy Roux, meilleur entraîneur européen en 1996


«On n’improvise pas ce système, on l’apprend»


«Je connais le 3-5-2, mais je l’ai découvert quand nous étions en marquage individuel. Quand il y avait un 4-4-2 en face, on prenait en individuel les deux attaquants et on mettait le libéro derrière. Ça faisait trois. Après on avait deux latéraux, trois milieux et deux attaquants pour contrer. Maintenant, on est en zone, ce n’est pas tout à fait pareil. Les caractéristiques : déjà on a choisi de mettre deux attaquants de pointe, un milieu de terrain de moins. Derrière, trois centraux qui doivent colmater les brèches et deux latéraux, de préférence des anciens ailiers, qui savent déborder et centrer. Ils ont un rôle offensif important, mais souvent moins bons dans le jeu défensif. Et puis, on a deux milieux qui servent de sentinelles. Si vous mettez ça sur un terrain ou en plan large sur une télévision, vous voyez immédiatement que le milieu de terrain est assez clairsemé. Entre les deux attaquants et les deux arrières centraux, il y a forcément une quarantaine de mètres et il y a seulement deux hommes là-dedans. Ces deux hommes-là sont très souvent mangés par l’équipe adverse si elle est en 4-3-3.


Sur le plan offensif, ça dépend de la qualité des hommes : si les deux attaquants sont formidables, les latéraux bons, vous allez marquer des buts. Si l’on a de bons joueurs, on gagne. Avec ce système, il ne faut pas improviser, les joueurs doivent l’assimiler. Si vous improvisez, il y a des failles et à valeur égale, vous perdez. De plus, si vous êtes dominés, le système se transforme en 5-3-2. Avec des gens décidés, vous pouvez ne pas prendre de but, en revanche, vous n’aurez pas beaucoup d’occasions. Souvent les arrières montent et oublient de revenir. Si l’équipe l’applique bien, si elle a les joueurs pour, ce système est rentable. Vous ne prenez pas beaucoup de buts, vous pouvez en marquer en contre-attaque. Mais si vous voulez avoir une équipe dominatrice, il faut choisir un autre système.»



Michel Dussuyer, ancien sélectionneur de la Côte d’Ivoire et de la Guinée


«L’avantage du 3-5-2, c’est une sérénité défensive accrue»


«Avec le 3-5-2, les triangles peuvent être différents au milieu. Les Italiens l’ont mis en place avec une pointe basse. D’autres pays comme l’Egypte, avec un numéro 10, un libéro et des stoppeurs, une méthode à l’ancienne. Il y a beaucoup de variantes. Avec ce système, les hommes des couloirs ont une grosse activité, doivent être capables d’attaquer, d’être de bons attaquants. Ils sont importants, mais pas que. Ça donne une stabilité derrière. On peut défendre à cinq. Il donne une connotation défensive, parce qu’on essaie d’aspirer l’adversaire pour le contrer. Après, pour l’utilisation du ballon, il y a deux attaquants : un pivot avec un joueur qui tourne autour, ou deux joueurs très mobiles. L’avantage de ce système, c’est qu’il donne une sérénité défensive accrue, et permet de pouvoir défendre sur toute la largeur du terrain.


En revanche, l’inconvénient c’est la récupération du ballon un peu basse. Donc ça va dépendre de ce que le coach a envie de faire, mais si je dois faire une photo, je dirai que l’utilisation du 3-5-2 ou 3-4-3, c’est déjà avoir une assise défensive solide et jouer sur les fautes de l’adversaire, le prendre en contre. Tout est dans l’animation et ce qu’on recherche. A la Can 2015, la Côte d’Ivoire a changé de système au cours du tournoi, elle est passée à une défense à trois et cela a porté ses fruits (championne d’Afrique). C’était une équipe de la Côte d’Ivoire qui aspirait ses adversaires, mais qui avait des joueurs devant capables de faire la différence avec des qualités de vitesse. Ça peut être adapté à l’effectif que l’on a, en mettant en exergue le potentiel des joueurs. Le sélectionneur, c’est celui qui à partir de ses joueurs, peut adapter un système qui convient à tout le monde. Qui met en valeur tout le monde. »



Lamine Dieng, ancien sélectionneur national


«C’est un système éprouvant, un couteau à double tranchant»


«Bien maîtrisé, ce système offre des garanties défensivement. Mais c’est un couteau à double tranchant. Si ceux qui sont censés permettre à la défense d’être à cinq à un certain moment n’ont pas les capacités pour faire les box to box, il risque d’y avoir de grosses failles. Surtout les latéraux. Sur le plan offensif, ce système offre des possibilités d’avoir quatre à cinq attaquants. Mais seulement quand c’est bien maîtrisé, à l’instar de Chelsea ou de la Juventus. Il faut un travail de longue haleine pour le mettre en place. Il faut avoir, surtout en défense, des joueurs tactiquement bons. Les centraux sont censés combler l’absence des latéraux, de la même manière qu’ils sont parfois censés, surtout l’axial, d’être un troisième milieu de terrain par rapport aux deux autres, qui sont très souvent devant la défense. Sur le plan offensif, le défenseur central axial entre dans le milieu. C’est un système très éprouvant. Surtout pour les avant-centres et les excentrés, les latéraux. Ça demande un effort physique impressionnant. Personnellement, je ne suis pas favorable à ce système, compte tenu de ce que cela demande comme capacités tactiques et efforts physiques. Pourquoi le sélectionneur a-t-il voulu essayer par rapport à une équipe qui a toujours joué en 4-3-3 ou en 4-2-3-1 ? Peut-être pour avoir d’autres flèches à son arc. S’il devait affronter des équipes plus offensives, cela lui permettrait de s’appuyer sur une bonne défense et pouvoir contrer. C’est une possibilité. Il ne faut préjuger de rien. Même si la meilleure façon de défense, c’est d’attaquer. Se préparer à toutes les possibilités, ce n’est pas une mauvaise chose, mais faudrait-il que les joueurs soient avertis des tenants et aboutissant de ce système.»


SALIOU GACKOU


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Publié par

Daouda Mine

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