Enquête : L’étrange histoire du marabout Abdoulaye Diop «Khass»

samedi 10 octobre 2020 • 5427 lectures • 1 commentaires

People 3 ans Taille

Enquête : L’étrange histoire du marabout Abdoulaye Diop «Khass»

PUBLICITÉ

IGFM - Révélé au grand jour par la bande à Cheikhou Guèye Sanekh, à travers leur émission Ngonal sur la Tfm, Abdoulaye Diop «Khass» détiendrait le pouvoir de guérir toutes les pathologies que la médecine moderne peine même à résoudre. Toutefois, le jeune marabout thiessois qui a fait fortune au pays de Yaya Jammeh et qui vient d’épouser la comédienne Soumboulou Bathily, traîne une réputation d’arnaqueur. Enquête…

Assise devant une table sur laquelle sont disposées des denrées alimentaires vendues au détail, au quartier TakhiKao de Thiès, Ndioufa Konté, légèrement dépigmentée, gère son petit commerce devant le portail de la maison paternelle d’Abdoulaye Diop «Khass». Là, le temps semble s’être figé. Peinture défraîchie, bâtisse d’une autre époque, tout renvoie à la précarité, à son enfance.

PUBLICITÉ


Né en 1984 dans ce populeux quartier de la grande banlieue de la commune de Thiès-Nord, le jeune marabout n’a pas gardé de bons souvenirs de cette période. Il préfère refouler cette partie de sa vie au fond de sa mémoire. Tout commence pour lui, comme l’existence normale d’un chérubin. Dès le bas-âge, il fréquente l’école coranique du coin, sous la houlette de Oustaz Mor Gaye.

PUBLICITÉ


A l’âge de 7 ans, il est inscrit à l’école élémentaire de Takhikao II appelée école «Mbar», avec ses salles de classes en paille. Plutôt intéressé par les études coraniques, il ne va pas user sa culotte trop longtemps sur les bancs de l’école. Ndioufa Konté, épouse du frère du père du jeune marabout, se rappelle que, malgré son jeune âge, il a très tôt pris conscience qu’il devait retrousser ses manches, pour relever le niveau de vie des siens. Une autre de ses particularités, son caractère trempé.


Turbulent et perturbateur, Abdoulaye Diop ne manquait pas une occasion de se battre. Ibou Sané dit Ibou Teug, batteur de tam-tam, un de ses amis d’enfance, qui a maintenu des rapports avec lui, s’en souvient comme si c’était hier. «Abdoulaye était vraiment belliqueux», confie-t-il. Comme tout jeune Thiessois forgé dans la rue, il avait le courage du lion. «Il fréquentait beaucoup les champs où on cultivait des légumes», se rappelle Ibou.


Rencontre avec un «Djiin» assis au sommet d’un arbre


Un crépuscule, alors qu’il avait quitté le champ du vieux Pape Sidy Bâ, tenant un sachet rempli de salade, le jeune garçon vit, au faîte d’un arbre, un djinn sous les apparences d’une femme, en train de tisser une broderie. Khass avait juste 13 ans. «Le djiin m’a foudroyé du regard, s’est transformé en un éclair, m’a soulevé très haut et violemment jeté au sol. Je me suis retrouvé propulsé non loin d’un puits. J’avais des vertiges à tel point que je m’en croyais au fonds», confie-t-il. Le gamin s’évanouit. Ayant repris ses esprits, il rentre chez lui, mais tombe gravement malade. Il ne pouvait rien avaler d’autre que du laitage. Trois jours plus tard, retrouvant peu à peu des couleurs, il raconte sa mésaventure à ses proches. Ses parents acquiescent, mais rangent l’affaire dans une case de leur mémoire.


Entre-temps, le jeune garçon parfait son éducation religieuse. Pétri de connaissances coraniques, il arrête son apprentissage et s’essaie à divers petits métiers pour assister son père dans les charges familiales. «Il a toujours voulu se substituer à son père. C’était un enfant généreux et débrouillard. Sa réussite ne me surprend guère», confie sa tante. Fils aîné d’une lingère nommée Amy Ndiaye, il est plus que jamais déterminé à réussir. C’est ainsi qu’il a tour à tour, été, apprenti maçon, manœuvre, marchand ambulant, bricoleur…


Ses connexions avec Yaya Jammeh


En 1999, la vie du jeune garçon bascule. Khass a 15 ans quand il perd son père, un peintre, suite à une très longue maladie. Il décide de prendre son destin en main et part à l’aventure. Avec 1 500 FCfa en poche, il prend les transports en commun et atterrit à Keur Massar, à la Cité Pénitentiaire (Jaxaay) dans la banlieue dakaroise. Il y séjourne pendant 2 mois et travaille comme gardien dans le chantier d’une maison en construction. Il perçoit 40 000 FCfa à la fin du mois. Le montant dérisoire lui permettait de régler son repas et ses petits besoins. Toutefois, il se serre la ceinture pour épargner 15 000 FCfa. Il réussira à garder 30 000 FCfa qui lui permettent de rallier Guinée-Bissau au début des années 2000. Il y réside plusieurs années avant de revenir en Casamance où il fait la rencontre d’un marabout réputé qui le prend sous sa tutelle. «Avant même que je ne le rencontre, je l’ai vu en rêve à 3 reprises», révèle-t-il.


Toujours assoiffé de connaissance, il va en Gambie où le Président Yaya Jammeh a un fort penchant pour la Médecine traditionnelle. Après un bref séjour, il revient à Ziguinchor où il fera moins d’un mois, puisque Jammeh le rappelle. Il prend le jeune marabout sénégalais sous son aile.


Abdoulaye Diop «Khass» est souvent sollicité par le ministre gambien de la Santé. Coopté dans le cabinet médical traditionnel institué par le Président gambien, «Khass» reçoit de Jammeh des diplômes qui certifient son savoir authentique, lui autorisant à pratiquer la médecine traditionnelle dans tous les hôpitaux. Il lui fait aussi le privilège de coordonner tout ce qui touche à la médecine traditionnelle. C’est au pays de Jammeh que Khass fait fortune avant de rentrer au bercail au bout de 4 ans.


En début 2015, il s’installe à Malika dans la banlieue dakaroise, au domicile d’une de ses tantes. Le jeune marabout s’était déjà fait une réputation. Son premier patient sera un enfant du délégué de quartier de Malika. «J’ai soigné un enfant de Malick Diop, délégué de quartier. Finalement, les gens venaient de partout. Et il n’y avait plus d’espace à la maison», signale-t-il. Il finit par déménager à l’Unité 17 des Parcelles Assainies de Dakar. La baraka lui sourit davantage. La liste de ses patients grossissait de jour en jour. Du Sénégalais lambda aux barons de la République, tout le monde toque à sa porte. Son aura s’amplifie. Aujourd’hui, son cabinet a pignon sur rue à Case Bi à Dakar.


Des pouvoirs ésotériques ? 


Son secret, Abdoulaye Diop aurait des «Djins» qui lui obéissent au doigt et à l’œil. Il s’enorgueillit d’avoir toujours soigné avec succès ses patients, avec des versets du Coran ou par le biais de la médecine traditionnelle. Les témoignages qui attestent ses pouvoirs ésotériques n’en finissent pas. Ndioufa Konté soutient avoir conduit auprès de lui la belle-mère de son grand-frère. «La vieille dame était une déficiente mentale qui errait dans les rues. Elle a un léger mieux, même si elle n’est pas guérie complètement. Je reconnais qu’elle n’a pas respecté ses rendez-vous. Mais elle a cessé de vadrouiller dans les rues», confie-t-elle. Ibou Teug, son ami, jure sur tous les Saints, avoir vu des handicapés entrer dans sa maison avec des béquilles et en ressortir en marchant. Même son de cloche du côté de Cheikhou Guèye alias «Sanekh».


Le comédien et sa bande sont d’ailleurs ceux qui ont contribué à la notoriété de «Khass» sous nos cieux. «Il devait faire une émission avec nous à Ngonal. Je suis donc allé voir ce qu’il faisait chez lui à Malika. J’y ai trouvé beaucoup de patients. J’ai rencontré au rez-de-chaussée une dame venue de Thiès qui avait amené sa fille élève au lycée El Hadji Malick Sy. Celle-ci était en proie à de graves crises d’épilepsie. Elle avait aussi perdu l’usage de la langue. J’ai dit à Abdoulaye Diop «Khass» que j’ai trouvé en bas une personne fatiguée. Il m’a dit de la faire venir. Quelques minutes après, la fille est redescendue seule, sans être portée. Elle marchait sans difficulté, je l’ai vue de mes propres yeux.


Une autre fois, j’ai assisté à une scène à son cabinet aux Parcelles Assainies. Une dame venue de France et qui ne pouvait pas marcher, s’est présentée à lui. Abdoulaye Diop «Khass» a pris les béquilles de la dame et lui a demandé de marcher. Elle s’est exécutée et cela a marché. Elle a soutenu avoir été partout pour se faire soigner, sans succès. Notre cameraman qui filmait nos séries, avait un ami Français dont l’enfant était malade. Abdoulaye Diop «Khass» l’a soigné. Je ne raconte pas de mensonges. J’ai été témoin de ces scènes», jure le compère de Jojo, la main sur le cœur.


Arnaqueur ?


Cependant, si certains s’accordent à dire qu’il possède le don de la guérison, d’autres pensent le contraire et vont même jusqu’à taxer le marabout de mystificateur. Ndoye Bane, animateur à la Tfm, est l’un d’eux. Il n’a pas hésité à lui envoyer des missiles au cours de l’émission Quartier général à la Tfm. Des victimes de la «fourberie» de Khass se seraient plaintes à lui. Parmi elles, une dame vivant à l’étranger. Ayant eu écho des prétendus pouvoirs du marabout, elle a vidé son compte bancaire pour se faire soigner par Abdoulaye Diop «Khass». Toutefois, au lieu de recouvrer la santé, c’est plutôt de la déception qu’elle écopera.


Entre ses consultations onéreuses, allant de 50 à 200 000 FCfa, «Khass» arnaquerait ses clients avec des potions, des encens qui n’ont rien de miraculeux. «Le seul effet que j’ai senti, c’est la fumée de l’encens qu’il a allumé et qui a failli m’asphyxier. A part ça, aucun de ses médicaments n’a agi ni estompé mon mal. Il m’a réclamé 120 000 FCfa pour rien», raconte une vieille dame sous le couvert de l’anonymat.


Mamadou (nom d’emprunt), lui voulait trouver une solution à son impuissance sexuelle. Il a cru que ses problèmes étaient finis, lorsqu’il a croisé le chemin d’AbdoulayeDiop «Khass». Il ne tirera que désillusion. Après un premier rendez-vous, il était convenu qu’il fasse d’autres séances avec lui. Seulement, il aura toutes les peines du monde pour revoir le marabout. Ce n’est pas faute d’avoir fait plusieurs navettes à son cabinet. Néanmoins, AbdoulayeDiop balaie ses accusations d’un revers de main. «Je prescris et donne des médicaments à mes patients. Mais si quelqu’un arrête de les prendre, alors qu’il n’a pas correctement respecté mes prescriptions, c’est normal qu’il ne guérisse pas», se justifie-t-il.


Soumboulou Bathily, la 1ere dame


Dans l’intimité, Abdoulaye Diop «Khass» a connu dans sa vie plusieurs mariages qui se sont malheureusement soldés par des échecs, au motif d’incompatibilité d’humeur. Si l’homme se targue d’être un fin guérisseur, côté amour, il n’est pas encore parvenu à trouver la bonne formule pour faire durer ses ménages.


Récemment, il a convolé en justes noces avec la comédienne de Soleil Levant, Soumboulou Bathily. Une union en grande pompe qui a fait couler beaucoup d’encre et de salives, avec une dot de 6 millions à la clé. Il faut dire que les choses sont allées très vite entre eux. Il n’a pas perdu du temps pour demander la main de l’héroïne de Wiri-Wiri. Reste à savoir si cette fois, la magie va opérer…


OUSSEYNOU MASSERIGNE GUEYE

Cet article a été ouvert 5427 fois.

Publié par

Daouda Mine

editor

1 Commentaires

Je m'appelle

Téléchargez notre application sur iOS et Android

Contactez-nous !

Daouda Mine

Directeur de publication

Service commercial